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Dans le Japon de l’ère Tokugawa (1603 à 1868), les excréments humains n’étaient pas considérés comme de simples déchets, mais comme une ressource précieuse au cœur d’un véritable système économique.

En 1724, un conflit éclata entre villages japonais autour d’Osaka – non pas pour éviter la corvée d’élimination des déchets, mais pour s’en disputer les droits de collecte. Cette situation s’explique par la valeur considérable attribuée aux matières fécales comme fertilisant agricole.

Au début du régime Tokugawa, les agriculteurs approvisionnaient Osaka en produits frais et recevaient en échange le « terreau de minuit » urbain. Mais l’augmentation progressive des prix des engrais transforma ces déchets en marchandise convoitée, donnant naissance à des organisations spécialisées détenant les droits exclusifs de collecte dans différents quartiers.

Cette économie des excréments était strictement réglementée : les propriétaires détenaient les droits sur les déjections solides de leurs locataires, tandis que l’urine, jugée moins précieuse, restait propriété des occupants. La valeur marchande était stupéfiante – les matières fécales annuelles de 10 foyers équivalaient à environ un demi-ryō d’or, somme permettant de nourrir une personne pendant une année entière.

L’enjeu économique était tel que des conflits éclataient régulièrement entre collecteurs rivaux. Les agriculteurs démunis, incapables d’acheter cet engrais vital, se risquaient parfois au vol d’excréments – un crime officiellement reconnu et puni d’emprisonnement par la justice japonaise.