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Les business angels sont-ils des flambeurs inconséquents, portés par l’amour du risque ? Des vampires de startups qui dépouillent leurs proies à la première réussite ? Ou des passionnés investis, qui apportent leur réseau, leurs compétences et leur expérience ?

Premier carburant financier des startups, sans lequel elles resteraient au stade de l’idée, ils sont surtout ceux qui prennent et assument les risques, souvent considérables. 90 % des startups échouent, entraînant la perte totale de l’investissement leur étant dédié. Les 10 % restants nécessitent une énorme patience (entre 7 à 10 ans) pour générer un retour sur investissement, appelé l’exit. Ainsi, un business angel investit de l’argent qu’il est prêt à perdre intégralement. Bien qu’en ayant souvent les moyens…

Prenons un exemple concret pour éclairer notre affaire. Imaginons l’un de nos anges investissant 20 000 € dans une startup de foodtech – domaine des technologies et innovations appliquées au secteur alimentaire – valorisée à 300 000 € en 2018. Six ans après, en 2024, la société, en réussite, est rachetée pour 15 M€. La part du business angel, après la dilution du capital liée à l’arrivée de nouveaux financements, se porte à 1,2 %, soit 180 000 €. Son retour sur investissement atteint neuf fois sa mise initiale. Sauf que, notre ange, dans le même temps, a misé sur neuf autres startups. Généralement, huit d’entre elles sont des fiascos, la dernière, sans générer de pertes, n’offre aucune plus-value. Au final le risque est bien conséquent, nécessitant courage, flair, patience, sans produire de jackpot, comparé à l’ensemble des investissements.

Pourtant, exceptionnellement, après des masses d’échecs, le business angel peut avoir misé sur une startup devenant ce qu’on appelle une licorne, à savoir une entreprise dont la valorisation dépasse le milliard d’euros, lui offrant un exit pouvant atteindre 100 fois sa mise initiale. Cela a pu être le cas des heureux ayant investi, par exemple 50000 €, dans la société Airbnb, fondée par deux designers californiens en 2008. Ceux-là ont vu leur mise se transformer en millions de dollars. Mais ce jeu, qui est tout sauf à somme nulle, est réservé aux amateurs d’adrénaline en capacité de mettre quelques billets sur la table de départ et détenteur d’un réel sang-froid assez peu partagé.

Mais pourquoi ne pas emprunter à la banque comme tout le monde ?

Parce que les banques exercent leur magistère dans le monde de l’entreprise traditionnelle. Elles exigent des bilans, des garanties, des business plans détaillés. Une startup, par définition, est une coquille vide avec une idée. Les business angels, eux, jouent un autre jeu : ils risquent leur propre argent, pas celui des clients ou des actionnaires. Ils œuvrent sans filet, ni parachute.

La France à la traîne ?

J’approfondis

En France, les business angels financent environ 3 000 startups par an, pour un montant total de 400 à 500 M€. C’est bien, mais peu comparé aux États-Unis où des financements dix fois supérieurs s’opèrent. Résultat : nous avons des champions – Veepee, Criteo, OVH, Mistral, Alan, Ledger – mais pas encore assez de géants. Pourquoi ? Contrairement à ce que l’on observe dans les pays anglo-saxons, nos fonds d’assurance-vie ne sont pas encore suffisamment orientés vers l’investissement dans les startups. Il est nécessaire de muscler notre jeu à ce niveau. A ce titre, l’inéluctable capitalisation partielle des retraites pourrait être un levier bénéfique. Tout comme la création d’un fonds souverain dédié au startups et porté par la Banque publique d’investissement (BPI).

Mais pourquoi font-ils cela ?

Parce qu’ils ont le goût de l’aventure, mais aussi et surtout celui de l’innovation. Ils diffèrent en cela des simples spéculateurs, peu préoccupés par l’objet de leurs investissements. Ils savent sentir les idées révolutionnaires qui vont changer la société, qu’importe que l’on juge que cela soit en bien ou en mal. Ils sont derrière les succès d’entreprises comme Uber, Airbnb, BlaBlaCar, OpenAI. Ils misent sur des projets parfois pensés par deux geeks phosphorants dans leur garage qui, un an après dirigeront 50 salariés, puis 1500 cinq ans plus tard. Mais ils ne s’arrêtent jamais, parce que le mouvement est dans leur ADN. Inlassablement, ils réinvestissent leurs gains dans d’autres projets, participant à stimuler l’écosystème dans lequel ils évoluent. Sans eux, des licornes françaises comme Doctolib, Back Market, Deezer ou ManoMano seraient restées des présentations PowerPoint sur un ordinateur.

Des mythes à déconstruire

Les startups financées par nos business angels charrient aussi leurs lots de mythes et de critiques dont certains méritent d’être débunkés. 

Non, les business angels ne spolient pas les fondateurs des startups auprès desquelles ils s’engagent. Loin de là.  Ils achètent des parts à un prix reflétant le risque qu’ils prennent. Ils ne se « gavent » pas non plus sans travailler. Ils offrent mentorat, introductions, et passent des heures à relire des pitchs gratuitement, en sachant qu’ils perdront le plus souvent leur argent. Un léger motif de stress, quand même… Pas davantage qu’ils ne sont des vautours. Un vautour est un charognard qui guette votre mort pour vous dépecer. Le business angel est tout le contraire. Il vous met sous perfusion pour que vous viviez dans l’espoir de vous voir connaître l’épanouissement.

* Cet article ne constitue pas un conseil ou une recommandation en matière d’investissement et ne saurait être considéré comme une sollicitation ou une offre de vente ou d’achat de tout instrument financier. Il est destiné à une information générale et ne prend pas en compte les objectifs, la situation financière ou les besoins spécifiques d’un investisseur. Nous vous recommandons de consulter un professionnel du secteur financier avant de prendre toute décision d’investissement.